ÉLODIE MENANT – Est-ce que j’ai une gueule d’Arletty ?

Avec « Est-ce que j’ai une gueule d’Arletty » (2 Molières) en ce moment au Théâtre Michel, Élodie Menant arbore de nombreuses casquettes : écriture, danse, chant et jeu. Rencontre joyeuse avec l’artiste à l’origine de ce spectacle musical survolté.

Le théâtre pour vous c’est une histoire de famille ? Un hasard ?

En 3ème, j’ai assisté à un spectacle musical des Misérables monté dans mon école, et j’ai été fascinée ! Plus tard, en prépa Maths Sup Maths Spé, je me sentais à côté de moi-même… Ma part appliquée coexistait mal avec celle en recherche d’amusement. J’ai donc fini par m’inscrire au Cours Florent, où j’ai notamment rencontré Laurent Natrella, professeur dont la pédagogie et la gentillesse m’ont marquée. J’ai plus tard intégré le Studio Muller, avant de commencer à jouer dans mes premiers spectacles.

Racontez-nous la genèse de Est-ce que j’ai une gueule d’Arletty ?

J’ai rencontré Éric Bu (co-auteur de la pièce, ndlr) à un anniversaire. Nous avons sympathisé et nourri l’idée d’écrire ensemble… Restait à trouver sur qui ou quoi (rire) ! Un jour, nous nous sommes envoyé le même message : Arletty ? Cette synchronicité était épatante ! Eric a commencé à se documenter sur elle, le projet naissait.

Sous quel angle avez-vous abordé la figure d’Arletty ?

Nous voulions aborder toute sa vie, de 0 à 94 ans. Balayer toute son histoire a aussi permis de mieux comprendre des situations qu’on aurait pû lui reprocher. Mais c’était un véritable défi : cela supposait de reconstituer chaque époque sur presque cent ans, sans tomber dans le piège de la narration. Nous avons donc fait d’Arletty une meneuse de revue, entourée de comédiens qui rejouent sa vie et lui imposent parfois des scènes qu’elle n’aurait pas voulu voir.

Qu’avez-vous appris sur Arletty ?

’ai notamment réalisé qu’elle nourrissait une véritable désillusion de l’être humain. Après avoir perdu son premier amour le tout premier jour de la Guerre 14-18, elle a développé un profond dégoût des politiques et des militaires, et a fait le serment de ne jamais se marier ni d’avoir d’enfants. Née dans une famille d’ouvriers, elle a toujours rêvé grand et elle a réussi. Son instinct de vie irradiait, tout le monde voulait travailler avec elle. Ceux qui l’ont connue disent qu’elle était une femme humble et très douce. C’est un personnage très complexe et très dense.

3 comédiens avec vous et plus de 35 personnages, c’est exigeant !

En plus de chanter et danser, chaque comédien joue entre 12 et 17 personnages ! Il faut composer avec
beaucoup de changements de costumes et un rythme effréné. Le rôle d’Arletty est probablement celui qui m’aura le plus sollicitée en matière de technique, de concentration et d’énergie.

Avec notamment 2 Molières, le spectacle reçoit un bel accueil. Qu’est-ce qui plaît au public ?

Le spectacle plaît pour différentes raisons : l’aisance des comédiens à passer d’un personnage à l’autre fascine, la magie opère et on se laisse emporter par ce tourbillon. Ensuite, le tempérament d’Arletty émeut, elle a toujours une répartie jouissive et drôle, et une formidable force de vie malgré les épreuves. Enfin, le spectacle parle à tous, y compris aux plus jeunes qui ne connaissent pas Arletty… Parce qu’on raconte avant tout une histoire sur la jeunesse, la vieillesse, la vie !

A défaut d’une gueule, est-ce que vous avez une âme d’Arletty ?

Je suppose dans l’énergie et le rapport à la liberté. Je vois Arletty comme une bourrasque, et c’est vrai qu’on me qualifiait de “courant d’air” lorsque j’étais petite (rire) !

Si vous étiez une expression d’Arletty, laquelle seriez-vous ?

“Moi je dis fatalitaire, pour pas être fataliste justement !”

D’autres projets ?

Une autre écriture Je ne cours pas je vole reprend à Avignon cet été et sera jouée à Paris prochainement. Je finalise par ailleurs une autre pièce que j’espère mettre en scène en 2023.

Un dernier mot ?
Vive la liberté, vive la vie !

Par Sophie Geneste

THÉATRE MICHEL