Ingrid Graziani, du ring à la scène

Au théâtre Montmarte Galabru, Ingrid Graziani revient tous les lundis soirs sur son incroyable histoire. Celle d’une jeune fille férue de sport qui devient l’une des meilleures boxeuses de France. Un spectacle intropesctif qui questionne la féminité avec beaucoup d’humour et de sensibilité.

© Florent Mousset

Parlez-nous de votre spectacle ? Qu’est-ce qui vous a donné envie de vous lancer dans cette aventure ?

Avec ce spectacle, je raconte mon histoire et les contradictions d’une fille qui fait de la boxe à haut niveau. Quand on est boxeuse, ce n’est pas évident d’assumer sa féminité. Dans les rencontres amoureuses, on a parfois l’impression de faire peur, le regard des hommes est toujours impressionné. Par exemple, on m’a déjà demandé : « mais tu crois que tu peux me mettre KO ? ». Je dis souvent que je provoque « un conflit flagrant de virilité » ! (Rires.) Je voulais raconter tout ça et questionner comment assumer sa virilité. À la fin du spectacle, j’ouvre sur quelque chose de plus profond, qui est moins dans la comédie : je raconte que si j’ai fait de la boxe c’est sûrement pour régler quelque chose avec moi-même… Je fais un peu le bilan sur ma vie finalement, c’est presque thérapeutique !

Pouvez revenir sur ce parcours du combattant qui vous a amenée jusque ici ?

Quand j’étais petite, j’étais un garçon manqué, j’adorais jouer au foot et les jeux de mecs. J’ai d’ailleurs toujours recherché le « masculin » dans mon adolescence et je me suis peut-être perdue moi, en tant que femme. C’est peut-être pour ça que j’ai ensuite participé au concours Miss France ? Dans le spectacle, je dis que c’était pour me reconnecter avec ma féminité et je raconte ensuite ma reconversion en tant que comédienne. Passer d’un univers de boxeuse et des vestiaires qui sentent la chaussette sale aux loges de théâtre. Deux mondes opposés presque ! J’ai arrêté la boxe il y a presque dix ans et j’ai mis dix ans pour écrire ce spectacle parce que j’avais besoin de recul sur moi-même.

Quelle est la différence entre un metteur en scène et un coach sportif ? Parlez-nous de votre relation avec Cécile Elias ?

Justement, Cécile a peu un rôle de coach envers moi ! Avec le coach de boxe, on travaille plus sur le corps et le physique alors que le metteur en scène, lui, gère plutôt l’aspect psychologique, avec un travail sur le texte et l’écriture. C’est drôle d’ailleurs, je dis souvent que Cécile c’est « mon petit Philippe Lucas » ! (Rires). On a véritable-ment une relation de confiance : elle rebondit beaucoup sur mes propositions, elle va me dire des choses, les associer à des propos plus personnels. C’est vraiment un travail d’équipe, comme dans le sport finalement.

© Mariapia Bracchi

Quelle est la réplique qui résume le mieux le spectacle ?

Je crois que la question qui pourrait au mieux résumer le spectacle, c’est celle que je me pose quand je me mets en robe lors d’un stage en équipe de France, que je sors de ma chambre et que j’ai un boxeur face à moi qui me dit : « mais qu’est-ce que tu fais ? Remets un pantalon on dirait un travesti ! ». Juste après, je me demande : « mais alors c’est quoi être une fille ? Est-ce qu’on peut être une fille et aimer jouer à la bagarre ? ». Finalement, je questionne les codes imposés par la société autour de la femme : il faut être sexy, jolie, féminine, mais ça peut vous empêcher d’aller vers certaines choses. Et puis il y a cette punchline, quand je rencontre un mec qui me dit : « mais genre si on se bat là tous les deux, tu me défonces ou pas ? ».

Après le ring et la scène, quel est votre rêve le plus fou ?

Je préfère laisser la vie me surprendre ! Et puis chaque chose en son temps. Pour l’instant, j’espère surtout que ce spectacle va mener sa petite vie. Des rêves, j’en ai plein la tête, je suis une grande rêveuse. J’adore la créativité et j’ai fait des études dans l’audiovisuel et le cinéma. Donc pourquoi pas quelque chose lié à la création dans le monde de l’image ? Si ce spectacle peut m’ouvrir des portes sur des rôles au cinéma, aussi, c’est vraiment ce que j’aime par dessus tout. Jouer.

Tous les lundis soirs, théâtre Montmarte Galabru, jusqu’au 14 mai.