Manon Rony pour « Vous permettez » au Funambule
« Vous permettez » : une farce de politesse (et de piques) au Funambule Montmartre
Quatre beaux-parents sont convoqués autour d’un dîner à leur insu par leurs enfants… Manon Rony livre une comédie de situation loin des stéréotypes : un huis clos où convenance, politesse et retenue font tout le sel. Ici, le rire naît des piques feutrées, des sous-entendus qui griffent et des sourires trop bien polis. Rencontre.
Comment êtes-vous arrivée au théâtre ?
Manon Rony : Je suis littéralement née dedans. Ma mère, Sotha, a cofondé le Café de la Gare : on habitait au-dessus, j’ai donc grandi avec les répétitions comme berceuse. J’ai joué mon tout premier rôle à 12 ans, puis réalisé ma première mise en scène à 16. À 18 ans, je suis partie voler de mes propres ailes.
Comment résumeriez-vous Vous permettez ?
Deux couples de parents sont piégés par leurs enfants pour qu’ils se rencontrent. Personne n’a vraiment envie d’être là, chacun fait bonne figure, mais les enfants ne viendront pas ! La soirée s’installe donc entre politesses, petites piques et maladresses. Il n’y a pas de clivage caricatural entre les deux couples : ils se ressemblent assez. Simplement, aucun n’avait vraiment envie d’être à ce dîner.
Pourquoi vous être emparée du sujet des beaux-parents ?
C’est un vertige universel pour un parent : la personne que tu aimes le plus au monde t’impose quelqu’un que tu n’as pas choisi… et que tu vas pourtant devoir accueillir et aimer, par amour pour ton enfant.
Vous parlez d’une comédie “sans climax”. Qu’est-ce que ça change ?
J’adore les “climax de rire” plutôt que les grands twists. Ici, pas de révélation grotesque ni de polarisation extrême entre les personnages. On rit plutôt des micro-décalages : un compliment un peu condescendant, une remarque lancée trop vite. Au fil de la pièce, un simple regard ou un détail suffit à déclencher le rire.
De quoi parlent des gens qui n’ont pas envie d’être là mais qui restent polis ?
D’abord des enfants, avec une asymétrie cocasse : d’un côté, des parents mis dans la confidence ; de l’autre, un couple qui découvre l’existence du gendre. Puis la conversation dérive vers des sujets plus ou moins sensibles, comme la situation du fils graphiste en freelance, qui représente un petit séisme pour un père habitué à des gendres architectes ou avocats. Au fil du dîner, un déplacement s’opère… que je garde secret !
Comment avez-vous écrit et mis en scène cette mécanique ?
J’écris pour mettre en scène : les répliques sont calées au mot près, avec des moments où l’on parle en même temps, comme dans la vraie vie. La farce, c’est du rythme : deux secondes de flou et tout retombe. Je me fais gentiment railler par les comédiens, mais c’est la rigueur qu’exige la comédie. La complicité se fabrique notamment en résidence : on part trois jours à la campagne, on fait bonne chair, on apprend à se connaître, et on revient copains !
Et la suite de votre actualité ?
Je prépare 9 minutes 29, une pièce autour du meurtre de George Floyd, création pour Avignon 2026. Et je reviens jouer au Café de la Gare dans Les dimanches de Sotha (dès le 16 novembre) avec ma mère : je me réjouis de la retrouver sur scène.
Un portrait chinois pour finir : si vous étiez un dîner, vous seriez ?
Un dîner à la maison, après un spectacle, avec des amis et des enfants : une grande tablée où ça parle fort et ça rit !
FUNAMBULE MONTMARTRE
du 20 novembre au 1er février
par Sophie Geneste