Benoit Solès, interview exclusive

« La Machine de Turing » rapporte l’extraordinaire histoire d’Alan Turing, mathématicien homosexuel anglais ayant décrypté la machine allemande ENIGMA durant la Seconde Guerre mondiale. Benoit Solès est l’auteur et l’acteur principal de cette pièce qui connaît un succès fulgurant et bouleverse les spectateurs. 

 

Comment le théâtre est-il entré dans votre vie ?

Ce qui m’a attiré au premier abord était le lieu en lui-même. Je me souviens d’une audition de piano au théâtre municipal d’agen, lorsque j’étais enfant… Ce premier contact avec la scène et les coulisses était plein de mystère. C’est plus tard que le théâtre s’est imposé, un peu par hasard : le groupe de théâtre de mon collège montait Antigone. À quinze jours de la représentation, le jeune homme qui jouait Créon se défile… On me propose le rôle ! Tout de suite, j’ai fait d’instinct ce que j’allais faire toute ma vie : aborder le texte, le répéter, le surligner et le mettre dans des pochettes quasi religieusement, essayer de le comprendre… Tout m’était étrangement familier ! À 18 ans, le bac en poche, je quitte Agen et tente ma chance à paris.

 

Du théâtre au cinéma, en passant par la restauration et la politique, vous réalisez tous vos rêves !?

(Rires) Je ne veux pas être uniquement un « comédien » et demeurer dans l’attente de propositions de rôles. J’ai besoin de voir autre chose et d’initier moi-même des actions ! J’ai en effet ouvert un bistrot, qui est devenu un bar à cocktail : Le Serpent à Plumes. Quant à la politique, elle est plus venue à moi qu’autre chose. en 1999, après ma rencontre avec Bertrand delanoë, j’ai participé à la création de son comité de soutien. plus tard, j’ai accompagné NKM sur son projet culturel à Paris, et je me suis ensuite retrouvé élu dans le 3ème arrondissement. C’est palpitant.

Qu’est-ce qui vous a mené à turing ?

Un coup du hasard… ou du destin, comme dirait Turing. En 2008, je dîne chez Agnès Jaoui. Alors qu’elle s’absente en cuisine, je consulte des sites sur la symbolique de la pomme. La page Wikipédia évoque la pomme de Newton, d’Adam et Ève, puis la pomme d’alan Turing, avec des références à Blanche Neige et au logo d’apple. Je suis interpellé et me plonge dans la biographie de cet extraordinaire mathématicien !

Nous sommes en 2008, il n’a toujours pas été réhabilité et le film The Imitation Game n’est pas encore sorti…

Tout à fait, une pétition pour le réhabiliter était d’ailleurs en cours. Je m’intéresse à l’affaire et me dis très vite que je vais faire une pièce sur lui ; tout d’abord pour contribuer à sa réhabilitation et ensuite parce que mon instinct me dit qu’il y a là un sujet de théâtre et un personnage exceptionnel…un héros absolu !

La Machine de Turing a explosé toutes les statistiques au festival d’Avignon 2018 et a rencontre un succès colossal à paris, comment expliquez-vous cet engouement?

Ce qui se passe avec cette pièce est extraordinaire. Après chaque représentation, les gens viennent à ma rencontre pour partager leurs réactions et sentiments. Ces échanges sont toujours d’une intensité bouleversante. Au-delà de la réhabilitation de Turing, il y a un message social et politique extrêmement fort, de respect et de tolérance.

Comment voyez-vous la suite de l’aventure Turing ?

Avec mon partenaire de scène et ami, Amaury de crayencour, nous retournons au festival d’Avignon pour proposer une seconde tournée 2020/2021 et nous nous lançons dès septembre dans la première grande tournée, pendant que la pièce continue à Paris. Nous nous rendrons en banlieue et dans toute la France, mais aussi à Monaco, au Liban, en Nouvelle Calédonie, à Tahiti, à New York, à Los Angeles, à San Francisco… C’est une aventure vertigineuse !

Par Sophie Geneste

Au Théâtre Michel