Stéphanie Bataille, impressionnante maîtresse d’école au Lucernaire

Stéphanie Bataille sait si bien nous faire rire. Cette fois, c’est seule sur scène et au service du poétique et vertigineux texte de Roberto Athayde, “Madame Marguerite”, très justement mis en scène par Anne Bouvier au théâtre Lucernaire. 

Rencontre avec la comédienne, qui nous confie avoir adoré l’école.

Qu’est-ce qui vous a plu dans ce rôle ?

“Madame Marguerite” dénonce le pouvoir, la dictature. Elle oscille entre rigidité et liberté. Je suis touchée par Madame Marguerite car c’est une femme seule, à la fois forte et d’une grande fragilité. Elle dévoue sa vie à l’enseignement, quoi de plus beau que de consacrer sa vie aux autres ? Elle ne se regarde jamais, elle donne tout au long du spectacle, elle est en osmose avec ses élèves, le public. Madame Marguerite s’adresse à vous tous.

Comment s’est passée votre collaboration avec Anne Bouvier ?

Anne Bouvier est une formidable directrice d’acteur, nous avons fait un long travail à la table afin de définir ensemble où nous voulions toucher le public. Elle s’est beaucoup préoccupée de savoir qui je suis afin de donner vie à Madame Marguerite. Elle a mis en lumière les failles, la folie, le don, l’écoute. Puis nous avons mis le texte « debout » ensemble, pour que Madame Marguerite interpelle tout le monde.

Plus jeune, étiez-vous bonne élève ? Qu’est-ce que vous a apporté l’école ?

J’ai adoré l’école. Je me souviens de tous mes professeurs. J’ai eu la chance d’avoir des professeurs généreux, à l’écoute. La plupart étaient très singuliers, avec une certaine folie. Ce qui m’a toujours fasciné, c’est leur passion. L’école était un rendez-vous, consciente qu’on y passait davantage de temps qu’à la maison. C’était l’endroit on l’on apprenait, et où on se faisait des amis. J’ai gardé beaucoup d’amis de la maternelle à la terminale. Madame Marguerite, c’est aussi une figure féminine.

Que pensez-vous de la place des femmes dans le théâtre aujourd’hui ?

Madame Marguerite est une seconde mère, elle montre un chemin. Elle est obsédée par son désir de communiquer son savoir. Elle secoue. Je pense que les femmes aujourd’hui ont un rôle de plus en plus important, mais c’est elles qui se construisent toutes seules. Elles sont courageuses. Elles cherchent à libérer la parole, en écrivant leur texte. Je suis admirative d’Andréa Bescond, auteure et comédienne du spectacle “Les Chatouilles”, son spectacle est exceptionnel, mais il va aussi faire bouger, réveiller le pouvoir politique. “Mon Ange” est aussi un spectacle qui interpelle, époustouflant. Lina El Arabi est époustouflante. Elle dénonce la condition de la femme en temps de guerre et les relations entre une fille et son père. J’ai la nette impression que les femmes montent sur scène aujourd’hui pour éclairer, pour bouleverser, pour faire passer des messages forts. Elles ont une envie sincère de réveiller les consciences. Elles ne jouent pas pour elles mais pour le public.

Quels sont vos prochains projets ?

Mon désir c’est que “Madame Marguerite” ait une longue vie, qu’elle puisse rencontrer un large public. Et aussi d’aller dans les écoles avec ce spectacle. Ce n’est pas rien de créer un spectacle. Il faut chercher tous les jours, donner…donner. C’est toujours bouleversant que l‘on vous demande tout de suite « Alors quels sont vos projets ? » alors que l’on vient de monter un spectacle, c’est un peu pareil que quand vous venez d’accoucher et que l’on vous demande « tu vas en faire un autre ?! ». Mon projet : c’est de tout faire pour que les spectateurs soient au rendez-vous, qu’ils sortent heureux. Leur donner le meilleur. Et qu’ils aient envie d’aller voir d’autres spectacles.

Théâtre Lucernaire, jusqu’au 27 janvier, du mardi au samedi à 19h.