Éric Assous, deux créations au théâtre Caumartin cet hiver
Eric Assous figure parmi les hommes les plus plébiscités de la scène théâtrale ces 20 dernières années. Récompensé à deux reprises pour le Molière du meilleur auteur francophone en 2010 et 2015, il a reçu le prix de l’Académie française pour l’ensemble de son œuvre en 2014. Ses pièces sont représentées dans plus de 25 pays. Deux de ses créations, « Les Acteurs sont fatigués » et « Mon Meilleur Copain » sont jouées à la Comédie Caumartin cet hiver.
Comment en êtes-vous arrivé à l’écriture ? S’agit-il d’une une vocation, d’une rencontre imprévue ?
Pas une rencontre, une vocation peut- être. Je dirais surtout que cela vient d’une timidité conjuguée à une passion pour le cinéma. J’ai commencé à écrire vers 14-15 ans. Des scénarios, des nouvelles, des dialogues, de la poésie… Je n’ai rien gardé, mais j’imagine que cela devait être assez maladroit et d’une grande naïveté. Mais j’avais ce plaisir à écrire, ce désir de m’évader à travers des personnages, des situations, des intrigues. Cela ne m’a jamais quitté.
Vos thèmes fétiches sont le couple, l’amitié le mensonge, la trahison… Où puisez-vous toutes vos idées ?
Pendant longtemps, je faisais travailler mon imagination. Puis progressivement, j’ai plutôt travaillé sur l’observation. Je regarde et j’attends d’être touché. Chercher au plus près la vérité des êtres, décrire leurs faiblesses, leur médiocrité, leurs compromissions. les personnages exemplaires m’ennuient et je ne sais pas trop les dépeindre … Peut-être parce que je n’y crois pas !
Ne serait-ce pas finalement un moyen de dédramatiser les fragilités et les égarements humains ?
Tout à fait. Un personnage me touche quand il se trompe, quand il cherche et qu’il ne trouve pas, quand il renonce. la fragilité est toujours plus émouvante que la force.
Avez-vous un maître en particulier, qui vous inspire et que vous admirez ?
J’ai été énormément influencé, mais plutôt au cinéma qu’au théâtre. pour n’en citer que deux : Audiard et Dabadie. Je dirais qu’ils m’ont presque tout appris. sur le fond, mais aussi sur la forme. Non seulement j’ai vu leurs films mais je les ai lus, étudiés, décortiqués. Dans mes premiers textes, le mimétisme était flagrant. J’espère depuis avoir trouvé mon style.
Dans «Les acteurs sont fatigués, un week-end entre amis comédiens tourne au règlement de compte à force de nombrilisme… Une situation qui vous est familière ?
Pas vraiment, mais lorsque je pars d’une situation, je cherche à la développer avec comme boussole l’intérêt que va présenter l’histoire et le réalisme des comportements. Si on a ces deux éléments, la comédie suit naturellement. La vérité des êtres m’amuse davantage que l’improbable et le burlesque.
Vous avez écrit près d’une centaine de pièces radiophoniques… Est-ce cette expérience qui a affûté votre talent pour les dialogues ?
Sans doute. Le sens du dialogue, c’est une question d’oreille. La justesse, le rythme, c’est pour moi quelque chose qu’on n’apprend pas mais qu’on perfectionne avec l’expérience. Parfois la musique des dialogues permet de trouver les idées suivantes. Je serais incapable d’écrire une pièce sans commencer par la dialoguer. Il y a des auteurs qui procèdent autrement. Une fois qu’ils ont construit leur intrigue, ils plaquent des dialogues. Il n’y a pas une bonne et une mauvaise méthode. Mais cette dernière n’est pas la mienne.
Quel est l’ingrédient essentiel d’une bonne pièce ?
L’humanité des personnages. est-ce que j’y crois ? Est-ce que des gens comme ça existent ? Si c’est oui, alors je marche. Après, on peut forcer un peu le trait !
Par Madeleine Vignelle