PATRICK MONS

Une prouesse artistique et physique !

Dans l’adaptation théâtrale de « La Solitude du coureur de fond », actuellement au Théâtre Funambule Montmartre, Patrick Mons se plonge corps et âme dans un rôle aussi exigeant physiquement qu’émotionnellement. Entre performance sur scène et réflexion sur la condition humaine, il revient sur ce texte d’Alan Sillitoe qui l’a marqué, et sur l’expérience inédite de l’endurance au théâtre.

Comment avez-vous découvert ce texte ?

C’est un metteur en scène anglais avec qui j’ai travaillé qui m’a fait découvrir ce texte. Je ne savais pas trop à quoi m’attendre, mais je l’ai lu et je l’ai immédiatement imaginé sur scène. La Solitude du coureur de fond est une nouvelle d’Alan Sillitoe, d’environ soixante pages, et le spectacle reprend presque le texte in extenso.

Que raconte ce texte ?

C’est l’histoire d’un jeune homme en maison de correction qui réfléchit à ce qui l’a conduit là. Il a grandi dans les faubourgs de l’Essex, toujours entouré de sa bande. Le directeur de la maison de correction repère ses qualités athlétiques et l’inscrit à une course de fond nationale entre maisons de correction. Ce qui est fascinant, c’est qu’au fur et à mesure de ses entraînements, il se construit dans la solitude. Petit à petit, il décide de ne pas obéir aux injonctions du directeur, de ne pas courir pour la rédemption qu’on lui propose. Il choisit de perdre volontairement la course, un acte de rébellion mais surtout un moyen de rester fidèle à lui-même.

Êtes-vous coureur vous-même ?

Je n’avais jamais vraiment couru avant, je faisais plutôt du vélo. Mais en lisant le texte, je me suis dit qu’il fallait que je comprenne ce que ça faisait. Pour ce rôle, je suis donc devenu marathonien ! C’était difficile au début, ça faisait mal, mais peu à peu, j’ai trouvé mon rythme. Sur scène, je cours sur place environ 50 minutes par représentation. La foulée structure le spectacle et donne une cadence au texte.

Courir près d’une heure sur scène, c’est un sacré défi…

Oui, c’est très engageant. Mais au final, c’est devenu naturel pour moi, comme un geste de théâtre. C’est un exercice mental et physique. Il faut courir tout en maintenant la lucidité nécessaire pour jouer et interagir avec le public.

La musique semble jouer un rôle important dans le spectacle. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Oui, la musique est essentielle. J’avais dès le début l’idée d’associer le souffle de la course à un autre souffle, celui d’un saxophone. J’ai rencontré Isaïe Cid, un musicien de jazz, et nous avons construit la partition du spectacle autour des solos d’Art Pepper, un saxophoniste de jazz West Coast. La musique accompagne le texte, elle rythme la course. Il nous a fallu un an et demi pour tout ajuster, mais le résultat est très puissant : les morceaux de saxophone sont calés sur mes mouvements et donnent un rythme à la course, presque hypnotique.

Pour conclure, un portrait chinois : si vous étiez un moment particulier d’une course, lequel seriez-vous ?

Je serais le 33e kilomètre, là où l’on se heurte au fameux « mur ». C’est ce moment de souffrance où on se demande ce qu’on fait là, mais qu’il se passe quelque chose de magique. Dépasser ce mur, c’est toujours un accomplissement. C’est ne plus en pouvoir mais continuer, et juste après se dire « J’ai bien fait de tenir le coup ». C’est un moment incroyablement fort.

Jusqu’au 10 novembre, au Théâtre du Funambule