Les remarquables comédiennes du ‘Jardin d’Alphonse’
“Le Jardin d’Alphonse” fait éclater les grands secrets et les petites vérités d’une famille endeuillée et ses proches, réunis à l’ombre d’un vieux pin le temps d’un déjeuner. Dirigée par Didier Caron, cette comédie printanière fait la part belle à cinq comédiennes, toutes remarquables sur scène. L’occasion pour elles de nous apporter leur point de vue sur la place des femmes dans le théâtre aujourd’hui.
Une figure féminine qui, selon-vous, représente le mieux le théâtre ? Pourquoi ?
Karina Marimon : Même si Jacqueline Maillan reste pour moi le nord de ma boussole, Dominique Blanc me semble être la comédienne qui incarne au plus juste l’esprit du théâtre Français d’aujourd’hui. Ses choix de textes sont toujours engagés et intelligents et son jeu ne laisse jamais personne à part.
Julia Dorval : Sarah Bernhardt pour sa passion jusqu’au-boutiste.
Sandrine Le Berre : Isabella Andreini car elle est la première femme à monter sur scène en France, les femmes étaient jouées par des hommes avant elle.
On dit souvent que le théâtre est un milieu dominé par les hommes, qu’en pensez-vous ?
Christianne Ludot : Le théâtre est le reflet de la société. Il est vrai que les femmes, comme partout ailleurs, doivent s’y battre encore plus pour exister. Il y a au théâtre –mais également au cinéma ou à la télévision– beaucoup moins de rôles féminins que masculins. Mais les choses sont en train de changer et on voit de plus en plus de femmes qui écrivent et mettent en scène. Et certains auteurs (comme Didier Caron !) écrivent de très beaux rôles féminins.
Gaëlle Lebert : Bien sûr, mais les directrices de théâtres, les metteures en scène, les productrices, les auteures sont de plus en plus nombreuses. C’est le résultat d’une volonté politique, mais aussi d’initiatives individuelles de femmes qui se sont battues comme des lionnes pour oser prendre cette place. Cela doit devenir exponentiel.
C’est quoi être actrice à l’heure d’aujourd’hui ?
Karina Marimon : C’est être de plus en plus « tout terrain ». Le mardi, il faut être capable de se lever aux aurores pour tourner un film puis filer à une séance de pubs pour dentifrice à la radio et enfin courir ventre à terre au théâtre pour jouer Shakespeare. Et le mercredi, il faut accepter d’attendre que le téléphone sonne, que personne ne vous désire pour le moment et continuer à jouer tranquillement la mère au foyer parfaite. Être actrice, ou acteur d’ailleurs, ça n’est rien d’autre que vivre selon le désir des autres… et cela n’est pas nouveau.
Julia Dorval : C’est comme être acteur mais en plus fort ! Blague à part il y a un peu de ça, car une actrice doit se battre plus, prouver plus, d’autant qu’il y a moins de rôle féminins et plus de comédiennes que de comédiens. Être actrice c’est aussi représenter la femme à travers les époques et se projeter sur celle de demain.
Votre personnage féminin préféré ?
Sandrine Le Berre : Antigone pour la puissance et la détermination mais je serai plutôt Juliette à vouloir mourir d’ amour.
Gaëlle Lebert : La marquise de Merteuil dans Quartett de Heiner Muller. Une femme forte, sensuelle, intelligente, libertine, complexe, qui fait tomber les masques et pour qui le masculin et le féminin s’échangent sans cesse.
Christianne Ludot : Camille Claudel pour son talent sa passion et son acharnement et Anna Karénine pour son « âme russe » et son désir d’absolu.
Au Théâtre Michel depuis le 19 janvier.