LE SECRET DES SECRETS

Benoit Solès nous parle de sa nouvelle création

Tandis que « La machine de Turing » et « La Maison du loup » continuent inlassablement à enthousiasmer le public, l’auteur et comédien aux 4 Molières Benoit Solès dévoile sa toute première mise en scène dans sa nouvelle création « Le secret des secrets » qui nous plonge dans une véritable aventure aux airs de chasse au trésor.

Comment s’est faite votre rencontre avec l’histoire que vous abordez dans ce spectacle ?

La genèse de la pièce remonte à mon adolescence où j’étais un lecteur assidu d’héroïque fantasy, de romans de princesses et de dragons, de grands romans d’aventure façon Jules Verne, de chasses au trésor façon Stevenson, de « livres dont vous êtes le héros » où l’on pouvait guider le personnage selon nos propres choix. Ces récits faisaient beaucoup marcher mon imaginaire et me fascinaient. Plus tard, j’ai continué avec Star Wars, Indiana Jones, etc. Et, il y a 2-3 ans, j’ai été interpelé par un article dans Sciences et Vie qui racontait l’aventure d’une jeune chercheuse américaine, Megan Piorko. Alors qu’elle préparait un doctorat d’histoire sur l’alchimie, cette science occulte qui existe depuis l’Antiquité et qui a pour but de transformer le plomb en or ou de produire un élixir permettant de guérir toutes les maladies voire de rendre immortel, elle avait découvert à la British Library un petit carnet qui contenait une recette codée, écrite à la main au 17e siècle, pour fabriquer la pierre philosophale. Mais même avec les ordinateurs les plus puissants elle n’était pas parvenue à la décoder. Elle a alors lancé une sorte de chasse au trésor sur Internet, et un jeune Turing australien a réussi à casser le code et à lire la recette. Cela m’a reconnecté à toutes mes lectures d’enfance, m’a amusé et m’a donné envie de la rencontrer et d’écrire sur le sujet. Évidemment pour savoir si la recette a marché il faut aller voir la pièce !

Vous avez rencontré cette chercheuse ?

Je voulais la rencontrer oui, alors j’ai envoyé une bouteille à la mer via Messenger, et elle m’a répondu ! « J’ai reçu des centaines de milliers de mails à la suite de ma découverte car tout le monde était excité par ça, et en scrollant j’ai vu le mot « théâtre » j’ai trouvé ça tellement étrange, et j’ai vu que c’était en français » m’a-t-elle dit. Puis on s’est rencontrés à Londres, à la British Library, elle m’a montré ce carnet que j’ai pu tenir entre mes mains, et je lui ai dit que je voulais écrire une pièce basée sur ses recherches et son histoire. Depuis, elle l’a vue et va revenir la voir à Paris en début d’année.

Comment avez-vous appréhendé cette toute première mise en scène ?

C’était une évidence pour moi qu’après Turing et La maison du loup, il me fallait un nouveau challenge. Ça a été instinctif de transposer la comédie d’aventure/chasse au trésor en une sorte de Da Vinci Code théâtral. Tout a été une aventure dans ce projet : la découverte de Megan, notre rencontre, l’écriture de la pièce, la mise en scène. J’ai voulu faire une intrigue croisée entre la quête des alchimistes au 17ème avec leurs manuscrits en latin et les 4 jeunes au 21e siècle qui cherchent à le décoder. C’est aussi une aventure humaine, spirituelle. Pour la mise en scène je me suis entouré des équipes qui avaient participé à la création de La maison du loup et La machine de Turing donc il y avait de la familiarité, de la confiance entre nous. Ce sont des créations que l’on fait ensemble. Et j’ai toujours adoré m’intéresser aux décors, à la lumière, etc. donc tout cela m’a semblé assez naturel.

Qu’est-ce qui a été le plus challengeant pour vous dans cet exercice ?

Diriger les acteurs ! Je ne l’avais jamais vraiment fait et, étant comédien moi-même, j’ai mis du temps à ne pas être un comédien qui dirige d’autres comédiens avec l’envie de leur montrer plutôt que de les laisser trouver ou les accompagner. Mais ce sont 4 jeunes acteurs absolument magnifiques, hyper doués, qui se sont emparés de la pièce, en ont fait quelque chose avec leur jeunesse et leur vision du monde. J’ai voulu respecter ça même si c’était différent de ce que j’avais imaginé, et j’ai finalement beaucoup appris d’eux.

Où vous épanouissez-vous le plus désormais, sur scène ou à la mise en scène ?

Toute expérience dans laquelle on se trouve confronté à nos limites est enrichissante et j’espère refaire des mises en scène. Mais la scène est quelque chose de merveilleux dont je pense ne pas pouvoir me passer. Et il y a autre chose qui est entré dans ma vie et qui, je pense, va occuper beaucoup de mon temps dans les années à venir c’est l’écriture. Là je viens de faire une adaptation du Fantôme de l’Opéra de Gaston Leroux pour un spectacle musical, j’adore ces projets d’écriture ! La mise en scène pourquoi pas, si l’occasion se présente, mais je privilégierai le jeu et l’écriture.

Si vous pouviez, d’un coup de baguette magique, vous retrouver dans la peau de l’un des héros de vos pièces, lequel choisiriez-vous ?

Dieu sait que j’aime et défends mes personnages, mais je n’aimerais pas me retrouver dans la peau de l’un d’eux. Je les aime, je les ai écrits, décrits, j’en ai incarné certains, mais je ne voudrais pas être eux et je ne me prends jamais pour eux. Dans Turing des gens ont eu la gentillesse d’écrire que je ne jouais pas Turing mais que j’étais Turing, ce qui est un très beau compliment mais qui est complètement faux. C’est comme lorsqu’on dit que l’on se met dans la peau du personnage, alors que c’est exactement le contraire ! Le personnage n’a pas de peau, c’est nous qui lui donnons la nôtre, donc on devrait dire « tu as bien prêté ta peau au personnage ! ».

Vous avez beaucoup écrit sur des personnages existants, n’avez-vous pas envie d’inventer votre propre héros avec sa propre quête ?

Absolument ! J’ai écrit sur Tennessee Williams, puis Turing, puis Jack London, comme si par pudeur j’avais besoin d’une
base biographique pour oser écrire. Le secret des secrets est peut-être ma pièce la plus originale parce que, même s’il y a des personnages historiques, j’ai inventé les personnages modernes. Dans la prochaine pièce que j’entrevois, je me suis donné le challenge de ne faire appel à aucun personnage préexistant, de les inventer totalement. On verra si j’y arrive !

Quels sont vos projets pour 2025 et que peut-on vous souhaiter ?

Me souhaiter d’être en bonne santé, et que le public continue d’être au rendez-vous. Quant à mes projets, mes trois pièces se jouent en ce moment et c’est très émouvant. La machine de Turing continue au Théâtre Michel, La maison du loup reprend à partir du 22 janvier, l’été prochain je jouerai Spinoza au théâtre du Chêne noir dans une pièce de Julien Gelas, et on me retrouvera aussi peut-être à Paris à la rentrée de septembre dans un rôle complètement différent et assez inattendu ! Je cherche toujours à me mettre des défis, quitte à surprendre.

Qu’auriez-vous envie de dire au public pour qu’il vienne voir Le secret des secrets ?

J’aimerais le remercier d’être là déjà, car on n’existe pas sans le public. J’espère qu’il acceptera de voir d’autres propositions car Le secret des secrets est une comédie d’aventure pour tout public qui n’a pas et ne cherche pas à avoir la portée presque métaphysique qu’il y a chez Turing. C’est une grande aventure, optimiste et joyeuse, qui parle beaucoup d’amitié, de fraternité, de la transmission du savoir. J’adorerais que des ados viennent entre eux, avec une classe ou en famille voir le spectacle et qu’il provoque en eux de l’émerveillement, des interrogations, des discussions.

A partir du 22 janvier, au Théâtre Rive Gauche