La Machine de Turing, le succès d’Avignon au théâtre Michel

C’est le buzz du off du festival d’Avignon : « La Machine de Turing » de et avec Benoit Solès arrive à Paris cet automne. Elle retrace le destin d’un des pères de l’informatique, un mathématicien britannique qui est parvenu à décoder les messages des Allemands lors de la seconde guerre mondiale. La première se tiendra le jeudi 4 octobre au Théâtre Michel.

Par Hélène Roger

 

À l’origine de cette pièce, l’envie de faire connaître Alan Turing, ce génie de l’ombre, salué tardivement par la reine Elizabeth II puis révélé par le film Imitation Game sorti en 2014 avec Benedict Cumberbatch. En effet, bien que son invention ait raccourci de deux ans la Seconde Guerre Mondiale (selon des historiens), Alan Turing n’a connu qu’une gloire posthume. Sur scène, Benoit Solès, flamboyant, porte ce personnage complexe, un brin associable, cynique, à la vie parfois monacale. En costume trois pièces et lunettes à grosse monture, il s’évertue à trouver la formule qui permettra de percer les mystères de la communication ennemie, celle émise par la machine allemande Enigma. Un dispositif qui diffusait les ordres d’Hitler. La cryptanalyse naît sous les yeux des spectateurs. La mission confiée à Alan Turing, classée secret défense par les autorités britanniques, est soutenue sur scène par un rythme dynamique et une écriture fusante, qui emprunte les codes du thriller psychologique.

Naissance du premier ordinateur

L’autre personnage central, c’est bien-sûr la machine, incarnée par un écran géant toujours animé. Il dévoile tantôt des calculs mathématiques vertigineux, tantôt une console aux dizaines d’interrupteurs et de boutons. Mais cet écran, au fond de la scène, sert aussi au décor et projette des images d’archives. Aux commandes de la création vidéo, captivante, on trouve Mathias Delfau, qui avait déjà travaillé sur Edmond, la pièce triomphale d’Alexis Michalik. Comme l’esprit torturé d’Alan Turing, sa machine ne cesse jamais de tourner : ses rouages résonnent en permanence dans la salle. Une respiration continue qui évoque sans doute le souffle des prémices de l’intelligence artificielle. Enfin, il ne faut pas oublier la performance d’Amaury de Crayencour qui revêt tous les autres costumes face à Benoit Solès : des collègues de ce savant fou, à son amant.

Un génie condamné

Car l’autre défi d’Alan Turing, mis en avant par la pièce, est celui d’assumer son homosexualité, considérée à l’époque comme une maladie et traitée par médicaments. La pièce de Benoit Solès permet également de rappeler au public que cet intellectuel bafoué sera condamné à la castration chimique pour homosexualité, jeté en prison et finira par se suicider au cyanure en 1954.

Benoit Solès

Benoit Solès a été formé à la classe supérieure d’art dramatique de Paris après des études littéraires. Comédien mais aussi auteur, il a débuté aux côtés des metteurs en scène Roger Louret et Jean-Luc Tardieu. Il est connu pour ses rôles dans les pièces La Java des mémoires et Les Années Twist récompensées aux Molières. Il a également joué dans le Cyrano de Bergerac d’Henri Larzini. Il a tourné dans des séries comme Les Vacances de l’amour ou Plus belle la vie. Pour La Machine de Turing, il retrouve le metteur en scène Tristan Petitgirard, qu’il l’avait déjà guidé dans Rupture à domicile.

Au Théâtre Michel.