BIG MOTHER
Quand le théâtre reveille les consciences
Après le triomphe de ses précédentes pièces « Les Crapauds fous » et « La Course des géants », l’auteure et metteuse en scène Mélody Mourey présente une nouvelle pépite au théâtre des Béliers Parisiens. Entre narration haletante et révélations vertigineuses, « Big Mother » emporte le public dans un tourbillon d’émotions fortes. Mélody Mourey et les comédiens Ariane Brousse et Patrick Blandin nous parlent de cette passionnante création.
Présentez-nous ce nouveau spectacle…
Mélody Mourey : Big Mother est un thriller journalistique à l’ère du Big Data. Alors qu’un scandale éclabousse le Président des Etats-Unis et agite la rédaction du New York Investigation, la journaliste Julia Robinson voit réapparaître son compagnon mort quatre ans auparavant. Son enquête pour élucider ce mystère croise celle de son équipe , et la petite cellule du New York Investigation se retrouve confrontée au plus gros scandale depuis l’affaire du Watergate.
« J’AVAIS TRÈS ENVIE DE RACONTER L’HISTOIRE DE JOURNALISTES D’INVESTIGATION PASSIONNÉS DEVANT METTRE DE CÔTÉ LEURS NOMBREUX DIFFÉRENDS POUR FAIRE ÉCLATER LA VÉRITÉ AU MILIEU DES FAKE NEWS. » MÉLODY MOUREY
Comment est née l’idée d’aborder un tel sujet ?
MM : Elle est née avec le scandale Cambridge Analytica, l’entreprise qui a analysé les données personnelles de millions d’utilisateurs de Facebook à leur insu, créé des campagnes de désinformation et contribué ainsi au Brexit et à l’élection de Trump. J’avais aussi très envie de raconter l’histoire de journalistes d’investigation passionnés devant mettre de côté leurs nombreux différends pour faire éclater la vérité au milieu des fake news.
« BIG MOTHER EST UN THRILLER JOURNALISTIQUE À L’ÈRE DU BIG DATA. » MÉLODY MOUREY
Big Mother possède une véritable dimension cinématographique. Comment s’y prend-on pour produire cet effet sur la scène d’un théâtre?
MM : Dans Big Mother on change à un rythme soutenu d’époques et de lieux : de la rédaction du journal à une chambre d’hôtel à Hong Kong, de Central Park à un pub universitaire ou à un tribunal. La musique composée par Simon Meuret renforce aussi ce côté cinématographique. Et les six acteurs donnent vie à une vingtaine de personnages. Les inspirations aussi sont cinématographiques : j’adore les thrillers journalistiques comme Spotlight ou Les Hommes du Président.
Ariane, Patrick, vous pouvez nous présenter vos personnages ?
Ariane Brousse : J’interprète Julia Robinson, une jeune journaliste qui travaille pour un journal américain à New York. Elle est impulsive, parfois excessive – la perte de son compagnon quatre ans auparavant en est certainement la cause – mais c’est une excellente journaliste, pugnace, qui a de l’instinct, et une bonne analyse des situations. Le chemin personnel qu’elle va devoir mener dans un temps très court, me pousse à l’interrogation et la remise en question de mon propre mode de vie. C’est ce qui me bouleverse dans la rencontre avec ce personnage.
« LE SUJET DE LA DICTATURE DU NUMÉRIQUE… M’A SEMBLÉ INSTANTANÉMENT AUSSI FASCINANT QUE NÉCESSAIRE. » ARIANE BROUSSE
Patrick Blandin : Owen Green est un type entier, sincère, intègre avec une vision du monde très idéaliste. Il aurait pu être communiste s’il n’était pas “redac chef” d’un média d’investigation américain. Il est philosophe et sage, mais également misanthrope face à un monde qu’il a pu observer durant ses 30 ans de carrière. Misanthrope mais pas désabusé, il est pour la justice, persuadé que la vérité triomphe toujours, quel que soit le prix à payer.
« LE PUBLIC NE PEUT PAS SORTIR INDEMNE DE CETTE HISTOIRE, TOUT LE MONDE EST CONCERNÉ. » PATRICK BLANDIN
Qu’est-ce qui vous a séduit ou touché dans cette histoire ?
AB : Le sujet de la dictature du numérique, tellement actuel, opaque et pourtant au centre de nos modes de vie à tous, m’a instantanément semblé aussi fascinant que nécessaire. La force du texte, c’est aussi d’aborder ce sujet à travers une fiction digne des meilleurs scénarios de films américains.
PB : Cette œuvre m’a séduit par son ancrage dans le réel. Tous les sujets politiques y sont abordés avec une rigueur, une qualité et une poésie surprenantes de réalisme. Le public ne peut pas sortir indemne de cette histoire, tout le monde est concerné. Je l’ai reçue comme un cadeau, mais aussi comme une gifle qui me disait « réveille-toi mon pote ». C’est un manifeste aussi puissant que Indignez-vous de Stéphane Hessel.
Si vous deviez résumer le spectacle en trois mots ?
PB : Virevoltant, nécessaire, engagé.
AB : Brûlant, pertinent, enlevé.
Par Marie-Lys de Cerval.
Au Théâtre des Béliers Parisiens.