DELUGE

L’espoir est-il une énergie renouvelable ?

Julien Héteau (directeur du Funambule Montmartre) est à l’affiche du « Déluge », un huis clos qui raconte le trouble face à une crise écologique absolue. Il nous en dit plus sur cette création qui apporte une forme nouvelle à celles présentées jusqu’ici au Funambule Montmartre.

Déluge, qu’est-ce que c’est ?

C’est une femme et un homme dans un no man’s land, en quête d’une solution pour sauver la planète, bien qu’elle soit déjà détruite. Elle veut se battre et s’inscrit dans une démarche active et militante, quand lui préfèrerait profiter de ce qu’il a amassé au cours de sa vie. Si ce dernier rechigne au début aux sacrifices, il va petit à petit s’engager dans la sobriété. À travers eux, nous voulons parler du trouble face à un contexte écologique abscons. 

Pourquoi ce titre ?

Il ne s’agit pas du déluge au sens christique ou météorologique du terme, c’est un déluge car tout tombe et disparaît sous l’eau. Mais en général… après le déluge vient le soleil !

Dans quel univers évoluent les deux personnages ? 

L’univers pourrait rappeler celui de Becket, notamment d’En Attendant Godot. Au fond, cette pièce traite de la peur de la mort : on peut décider de la nier et faire beaucoup de choses pour l’oublier, ou bien de l’accepter, à condition d’assumer cette position. 

Comment est né ce projet ? 

Cela fait longtemps que je cherchais à travailler sur la place de l’homme dans l’harmonie des choses : pour moi, c’est le seul sujet ! Comment questionner notre façon de consommer, retrouver notre place et abandonner le rapport de force ? C’est avec l’autrice Laure Loaec et la comédienne Amandine Pudlo que le projet est en train de prendre vie. Il s’agit d’une forme très nouvelle pour le Funambule !

En quoi cette création détonne-t-elle de celles proposées au Funambule jusqu’ici ?

 Il s’agit d’une nouvelle proposition de théâtre, très sobre et épurée. Au plateau, on ne retrouve qu’un escalier dont on ignore où il mène. Il y a également beaucoup de silences. Quelque part, ce dépouillement artistique est une mise en abîme de ce que vivent les personnages plongés dans un monde plein d’inconnus. Nous aussi, on se demande comment affronter cette nouveauté, c’est vertigineux.

« JE CHERCHE DEPUIS LONGTEMPS À TRAVAILLER SUR LA PLACE DE L’HOMME DANS L’HARMONIE DES CHOSES : POUR MOI, C’EST LE SEUL SUJET ! »

La notion de sobriété se retrouve donc jusque dans le texte… 

Exactement, et cela s’inscrit dans une démarche et une réflexion plus globales, où je tâche de ralentir et m’éloigner à tout prix du gigantisme.Voilà deux ans que je me suis mobilisé pour changer mes habitudes de vie pour ce qui me paraît utile pour la planète. Si changer le contenu de mon assiette a pu être frustrant, j’y trouve une forme de réconfort sur le long terme et découvre une plus grande sérénité, hors du plaisir immédiat. De la même façon, les silences de la pièce vont à rebours du réflexe rassurant et satisfaisant d’accumulation de texte. Avec le texte, on sait que l’on produit un effet immédiat… travailler autant dans le silence me sort donc de ma zone de confort artistique, c’est particulièrement intéressant.

« IL S’AGIT D’UNE NOUVELLE PROPOSITION DE THÉÂTRE, TRÈS SOBRE ET ÉPURÉE. »

Quel message souhaitez-vous communiquer avec cette pièce ? 

Ce qu’on essaye de prôner, c’est que l’amour pourrait être la clé du problème. Si on aimait autant la planète qu’on s’aime soi, peut-être n’en serions-nous pas arrivés là. Lorsqu’on aime véritablement une personne, on fait tout pour qu’elle se porte bien.

Pour finir, pouvez-vous nous partager une réplique marquante de la pièce ? 

Bien sûr : “Est-ce que l’espoir est une énergie renouvelable ?”

Par Sophie Geneste.

Au Théâtre du Funambule.