Les crapauds fous : c’est quoi être scénographe ?
« Les Crapauds Fous », c’est un premier spectacle qui adapte sur scène avec beaucoup de talent un fait divers vraiment incroyable de la Seconde Guerre mondiale. Une première mise en scène réussie, des comédiens passionnés et enthousiastes, une équipe technique inventive… Autant d’ingrédients qui ont permis le succès de cette comédie d’aventure. Elle a tellement séduit le public cet été, qu’elle est prolongée au théâtre des Béliers Parisiens. Nous ne demandions pas mieux !
Par Lola Boudreaux
Dans le précédent numéro, nous rencontrions Mélody Mourey, la metteure en scène qui a tout savamment orchestré. Cette fois, nous avons souhaité questionner le scénographe, Hélie Chomiac, qui plonge avec le spectateur dans deux espaces-temps, entre le New York des années 1990 et la Pologne des années 1940. Et c’est très réussi.
Pour commencer, pourriez-vous expliquer à nos lecteurs en quoi consiste exactement votre métier de scénographe ?
Un scénographe conçoit en collaboration avec un metteur en scène l’espace scénique dans lequel va se dérouler le spectacle. Très concrètement, j’ai imaginé le décor des Crapauds fous.
Pouvez-vous nous raconter comment se projet est-il arrivé jusqu’à vous ? Qu’est-ce qui vous a donné envie de relever le défi ?
J’ai rencontré Mélody aux cours Simon il y a cinq ans et nous avions réalisé ensemble déjà de nombreux projets. Je m’étais notamment occupé de la scénographie de sa première pièce Terminus et nous avions beaucoup aimé travailler ensemble. Pour Les Crapauds fous, elle m’a fait lire son texte en me proposant d’y incarner le personnage d’un officier allemand et de réaliser aussi la scénographie. J’ai été emballé par cette histoire vraie, et j’ai immédiatement accepté de faire partie de l’aventure.
Comment votre travail s’est-il articulé avec celui de la metteure en scène ?
Mélody m’a parlé de sa mise en scène et de ses envies, elle tenait à ce que le décor soit manipulé par les acteurs durant le spectacle, qu’on passe de l’intérieur à l’extérieur, d’un pays à un autre, avec des panneaux sur roulettes. Je lui ai fait plusieurs propositions réalisables avec le budget extrêmement limité qui était le nôtre, proposé des ambiances, des couleurs, des matériaux… J’ai réalisé de nombreux dessins pour chaque scène, puis j’ai construit le décor en une semaine au milieu du salon. Toute la troupe s’est mobilisée pour faire ensuite sortir ces immenses panneaux par la fenêtre de l’appartement et les mener au Ciné 13… Puis nous avons abandonné ce décor avant l’exploitation au théâtre des Béliers Parisiens car, grâce aux producteurs du spectacle, nous avons à présent la chance de pouvoir les refaire avec davantage de moyens et une talentueuse équipe de constructeurs et de peintres…
Comment vous êtes-vous documenté pour créer les différentes ambiances du spectacle ? Pour vous, c’est quoi, une scénographie réussie ?
L’histoire des Crapauds fous nous fait essentiellement traverser deux époques, le New York des années 1990 et la Pologne de 1940. Pour les années1990, l’histoire se déroule dans un cabinet médical et dans un pub : j’ai puisé mes idées dans des films et photographies de cette période. Pour les années 1940, j’ai cherché l’inspiration à travers des documentaires, témoignages, et photographies du village en question. Je me suis aussi promené dans les rues du village actuel sur Google map, cherchant des bâtiments encore existants. J’ai ainsi pu retrouver le cabinet médical du véritable héros de l’histoire, dont je me suis fortement inspiré. Une bonne scénographie doit conserver l’univers de l’auteur, toute en respectant les contraintes de la mise en scène, et en facilitant le plus possible le jeu des comédiens. Les panneaux sur roulettes n’ont pas toujours été faciles à manipuler sur le plateau. Le premier filage du spectacle a duré quatre heures au lieu d’une heure trente et nous avons eu quelques instants de panique. Mais, avec énormément de répétions, tout paraît aujourd’hui simple et fluide.
Théâtre des Béliers Parisiens, jusqu’au 31 décembre.