Hector Obalk : « Toute l’histoire la peinture en moins de deux heures »

 

Hector Obalk présente le nouveau parcours de son spectacle « Toute l’histoire de la peinture en moins de deux heures » au Festival Off d’Avignon 2025. À travers ce voyage éclairé, et tout nouveau parcours de sa saga, il invite le public à apprendre à regarder la peinture autrement. Il s’attarde sur les détails révélateurs du génie de maîtres tels que Giorgione,Titien, Rembrandt ou Goya. Une manière ludique de ne plus jamais se sentir perdu dans un musée.

 

Vous êtes historien, critique, auteur, réalisateur… Mais c’est la scène que vous investissez pour parler de peinture. Qu’est-ce que ce médium offre de particulier ?

Seule la scène permet d’improviser. Il n’y a pas de texte écrit car je connais mon sujet. L’auditoire finit toujours par vous perdre quand vous récitez du par cœur. En réalité, je n’improvise qu’au sens syntaxique du terme. Je m’adresse au spectateur comme je vous parle, sans prendre un ton particulier de professeur. Les premières séances sont moins réussies, bien sûr. Il me faut au moins une trentaine de représentations pour que le spectacle soit bon.

 

Comment vous est venue l’idée de ce pari presque fou : condenser sept siècles de peintures en deux heures ?

Dès qu’on prend du temps, ne serait-ce que 5 minutes, sur les détails d’un seul tableau, ce n’est plus superficiel, ni théorique, ni historique, ni politique… On est dans la matière même de l’art, c’est-à- dire sur quelque chose de visuel. La qualité des images, que j’ai mis 20 ans à accumuler, compte également beaucoup dans la qualité du spectacle.

 

Vous ne suivez pas toujours la chronologie classique de l’Histoire de l’art et vous assumez un regard parfois à rebours du consensus. Pourquoi ce choix ?

Mes choix ne sont pas tellement originaux. Il n’y a que sur l’art contemporain que les avis semblent demeurer irréconciliables. Le consensus est général dès qu’on sort de l’art moderne. Les meilleurs peintres restent Van Eyck, De Vinci, Giorgione,Vélasquez, Rembrandt,Vermeer, Goya. Ce n’est tant pas mon choix qui est original, c’est ma manière de parler des tableaux choisis.

 

Quelle est la différence fondamentale entre un vulgarisateur et un critique, selon vous ?

Un « vulgarisateur » va dire simplement des choses que les érudits ont du mal à dire simplement, et c’est une tâche très louable. Mon discours se limite à donner des idées personnelles que les érudits ne pensent pas forcément. Je m’adresse aussi bien aux spécialistes qu’au grand public. Ce que je raconte ne se trouve pas sur Wikipédia, car mon propos n’est pas d’ajouter des informations historiques aux tableaux commentés, mais de les apprécier, de faire en sorte que les gens sachent reconnaître un tableau de Corrège ou de Titien par exemple.

page36image38133888

« J’APPRENDS AUX GENS À REGARDER EN LEUR DISANT COMMENTE JE JUGE »

 

Vous opposez des figures majeures, comme Cézanne et Van Gogh, ce que l’on évite habituellement de faire. Qu’espérez- vous déclencher ainsi chez le spectateur ?

Oui, je provoque le spectateur en disant « du mal » de Botticelli pour dire « du bien » de De Vinci, du mal de Claesz pour dire du bien de Chardin, du mal de Van Gogh pour dire du bien de Cézanne. Mais en réalité, je ne dis pas du mal de Botticelli, je ne fais que nuancer un jugement sur un tableau précis. Évidemment, les trois « victimes » restent de très grands peintres, mais je fais entrer le spectateur dans mon regard, et ce regard n’est pas général, il parle de telle peinture précisément.

Et j’apprends ainsi aux gens à regarder en leur disant comment je juge. Car toute œuvre d’art est faite pour être jugée, plutôt qu’être comprise ou interprétée. Pour moi, il n’y a pas grand- chose à comprendre dans un tableau, sinon ce qui n’est pas pictural en lui, c’est- à-dire son sujet biblique, profane ou historique. Le but intime du peintre, ce n’est pas de rendre hommage à laTrinité ou à la gloire de tel Roi, mais de fabriquer de la beauté. C’est essentiel, et c’est ce qu’il y a de plus difficile à faire passer.

Vous avez déjà conquis plus de 150 000 spectateurs. Quelle est votre clef du succès ?

La sincérité, le vécu, la sensibilité, il n’y a que cela qui compte. Je marque des points quand j’arrive à faire aimer un peintre ou une peinture qui semblait un peu rébarbative au premier abord. J’ai déjà fait 5 spectacles sur l’histoire de la peinture, en passant par des chefs d’œuvres choisis parmi chacun des siècles considérés, jamais les mêmes bien sûr.

Mon prochain spectacle, que je joue ce mois-ci au Théâtre 3S – le 10th avenue à Avignon, privilégiera les peintres qui, après De Vinci, ont introduit un cer tain flou dans la matière et un certain mystère dans l’atmosphère évoquée. Il s’agit notamment de Giorgione,Titien, Rembrandt… dont je n’avais encore jamais parlé.

 

THÉÂTRE 10TH AVENUE, Du 5 au 26 juillet, 17h30

Par Caroline Guillaume