Pierre Matras, une innocence bouleversante
Pour la rentrée, la Comédie Bastille vous réserve un monologue tendre et émouvant, inspiré du roman épistolaire « Oscar et la dame Rose » d’Éric-Emmanuel Schmitt. Sur scène, le comédien Pierre Matras interprète les lettres d’Oscar, un petit garçon de 10 ans qui, depuis son lit d’hôpital, écrit à Dieu alors qu’il va bientôt mourir. Un regard crédule sur le monde, plein d’innocence, et qui fait du bien.
Par Lola Boudreaux
La première question qui nous vient tout de suite à l’esprit est : comment un acteur de 35 ans réussit-il aussi bien à se mettre dans le peau d’un petit garçon ? Comment vous êtes-vous préparé pour ce rôle ?
Étrangement, interpréter un petit garçon de 10 ans n’a pas été la partie la plus difficile du travail. l’enfant qui sommeille en moi a un sommeil des plus légers : il n’a pas été long à se réveiller ! Lucie Muratet (metteuse en scène) m’a aidé à le retrouver. et dès lors, la voix et la gestuelle sont venues toutes seules. depuis le temps qu’on me dit que j’ai des yeux d’enfant, il fallait bien que cela me serve un jour !
Selon vous, quelles sont les principales difficultés de ce rôle ?
La partie la plus difficile a été non pas d’interpréter différents personnages, mais que le petit Oscar les fasse vivre à travers lui, se les rappelle. On ne voit pas sur scène un acteur qui interprète plusieurs personnages mais un petit garçon qui s’amuse à imiter les gens qui remplissent sa vie. La nuance est subtile mais c’est cela qui a été le plus difficile à trouver.
Jouer un sujet dramatique vous a-t-il paru difficile ?
Le côté dramatique de la pièce est tout à fait relatif du point de vue d’Oscar. Certes, il y a le passage où il apprend qu’il va mourir. Mais c’est une infime partie de l’histoire. dans tout le reste de la pièce, il vit une vie pleine de fougue, de passions, d’aventures, d’acceptation de son destin. La tristesse est plus du côté du spectateur qui ne veut pas voir partir Oscar. Mais lui vit des tas de choses qui remplissent une vie pleine et entière.
Comment s’est passé le travail de mise en scène avec Lucie Muratet ?
J’ai demandé à Lucie de me mettre en scène car je la connais bien et j’avais besoin d’un metteur en scène femme, très douce et très maternelle. elle est comme ça, Lucie. C’est la douceur et la gentillesse personnifiées. Pour ce rôle, je sentais que c’est ce qu’il me fallait.
Qu’est-ce qui vous a le plus touché à la lecture du roman ? Êtes-vous un lecteur régulier d’Éric-Emmanuel Schmitt ?
Ce roman m’a littéralement bouleversé. Je riais en le lisant et la seconde d’après, j’éclatais en sanglots, à tel point que je ne pouvais plus voir les lignes. Jamais un livre ne m’a procuré de telles émotions. Je suis un lecteur assidu d’Éric-Emmanuel Schmitt, que ce soit ses romans ou ses pièces de théâtre, que j’affectionne particulièrement.
Et pour finir, si vous deviez défendre cette pièce en quelques mots seulement, que diriez-vous ?
Quelle question difficile ! Je crois que la pièce elle même n’a pas besoin d’être défendue. c’est un pur chef-d’œuvre. sur un sujet des plus difficiles, Éric Emmanuel Schmitt a réussi à faire un roman bouleversant, bien sûr, mais aussi rempli d’humour, d’humanité, de tendresse et de poésie. On ne sort pas de ce spectacle indemne. Notre vision de la vie, et donc de la mort, est modifiée. Il n’est pas rare qu’à l’issue d’une représentation, un spectateur, les yeux encore humides mais un sourire franc, vienne me dire que grâce à ce texte et au spectacle, il n’avait plus peur de mourir. Et ne plus avoir peur de mourir, c’est commencer à vivre différemment, non ?